Si vous êtes curieux de savoir comment la compatibilité binaire avec Linux fonctionne,
cette section est faite pour vous. La plupart de ce qui suit est principalement basé sur
un courrier électronique de Terry Lambert <[email protected]>
envoyé à la liste de
diffusion pour la discussion de sujets non-techniques en rapport avec FreeBSD
(Message ID: <[email protected]>).
FreeBSD possède une abstraction appelée “chargeur de classe d'exécution”. C'est une portion de l'appel système execve(2).
Ce qui se passe est que FreeBSD dispose d'une liste de chargeurs, à la place d'un simple chargeur avec retour (“fallback”) vers le chargeur #! pour exécuter n'importe quel interpréteur de commandes ou procédure.
Historiquement, l'unique chargeur sur les plate-formes UNIX® examinait le nombre magique (généralement les 4 ou 8 premiers octets du fichier) pour voir si c'était un binaire connu par le système, et si c'était le cas, invoquait le chargeur binaire.
Si ce n'était pas le type de binaire du système, l'appel execve(2) retournait un échec, et l'interpréteur de commandes tentait de l'exécuter comme une commande d'interpréteur.
Cette hypothèse est celle par défaut quelque soit l'interpréteur de commandes actuel.
Plus tard, une modification a été faite sur sh(1) pour examiner les deux premiers caractères, et s'ils étaient :\n, alors elle invoquait l'interpréteur de commandes csh(1) à la place (nous pensons que l'entreprise SCO fut la première à faire cette modification).
Ce que fait maintenant FreeBSD est de parcourir une liste de chargeurs, avec un chargeur #! générique qui reconnaît les noms des interpréteurs qui se trouvent après le caractère espace suivant, puis avec un retour possible vers /bin/sh.
Pour le support de l'ABI Linux, FreeBSD voit le nombre magique comme un binaire ELF (il ne fait pas la différence à ce niveau entre FreeBSD, Solaris™, Linux, ou tout autre système d'exploitation qui dispose d'un type d'image ELF).
Le chargeur ELF recherche une marque spécifique, qui se trouve dans une section de commentaire dans l'image ELF, et qui n'est pas présente dans les binaires SVR4/Solaris ELF.
Pour que les binaires Linux puissent fonctionner, ils doivent être marqués sous le type Linux avec brandelf(1):
# brandelf -t Linux file
Quand cela est fait, le chargeur ELF verra le marquage Linux sur le fichier.
Lorsque le chargeur ELF voit le marquage Linux, le chargeur remplace un pointeur dans la structure proc. Tous les appels système sont indéxés par l'intermédiaire de ce pointeur (dans un système UNIX traditionnel, cela serait la structure sysent[], contenant les appels système). De plus, le processus est marqué pour une gestion spéciale du vecteur d'interruption (“trap”) pour le signal de code “trampoline”, et plusieurs autres corrections (mineures) qui sont gérées par le noyau Linux.
Le vecteur d'appel système Linux contient, entre autres, une liste des entrées sysent[] dont les adresses résident dans le noyau.
Quand un appel système est effectué par le binaire Linux, le code “trap” déréférence de la structure proc le pointeur de la fonction de l'appel système, et utilise les points d'entrée Linux, et non pas FreeBSD, de d'appel système.
De plus, le mode Linux redéfinit dynamiquement l'origine des requêtes; c'est, en
effet, ce qu'effectue l'option union
(pas le type de système de fichiers
unionfs!) de montage des systèmes de fichiers. Tout
d'abord, une tentative est faite pour rechercher le fichier dans le répertoire /compat/linux/chemin-origine,
puis uniquement si cela
échoue, la recherche est effectuée dans le répertoire /chemin-origine. Cela permet de s'assurer que
les binaires nécessitant d'autres binaires puissent s'exécuter (par exemple,
l'ensemble des outils Linux peuvent tourner sous l'ABI Linux). Cela signifie
également que les binaires Linux peuvent charger et exécuter les binaires FreeBSD,
s'il n'y a pas de binaires Linux correspondant présents, et vous pourriez
placer une commande uname(1) dans
l'arborescence /compat/linux pour vous assurer que
les binaires Linux ne puissent pas dire qu'ils ne tournent pas sous Linux.
En effet, il y a un noyau Linux dans le noyau FreeBSD; les diverses fonctions sous-jacentes qui implémentent tous les services fournis par le noyau sont identiques entre les deux tables d'entrées des appels systèmes FreeBSD et Linux: les opérations sur les systèmes de fichiers, les opérations sur la mémoire virtuelle, la gestion des signaux, l'IPC System V, etc. La seule différence est que les binaires FreeBSD utilisent les fonctions glue de FreeBSD, et les binaires Linux celles de Linux (les plus anciens systèmes d'exploitation avaient uniquement leurs propres fonctions de glue: les adresses des fonctions dans une structure sysent[] statique globale, au lieu des adresses des fonctions déréférencées d'un pointeur initialisé dynamiquement pointant vers la structure proc du processus faisant l'appel).
Laquelle est l'ABI native FreeBSD? Cela n'a pas d'importance. Basiquement, la seule différence est que (actuellement, cela pourrait facilement changer dans les versions futures, et probablement après cela) les fonctions glue de FreeBSD sont liées en statique dans le noyau, les fonctions glue Linux peuvent être liées statiquement, ou l'on peut y accéder via un module du noyau.
Oui, mais est-ce vraiment de l'émulation? Non. C'est l'implémentation d'une interface binaire pour les applications (ABI). Il n'y a pas d'émulateur (ou de simulateur, pour couper court aux prochaines questions) impliqué.
Mais pourquoi appelle-t-on parfois cela “émulation Linux”? Pour rendre difficile la vente des versions de FreeBSD! Sérieusement, c'est dû au fait que l'implémentation historique a été faite à une époque où il n'y avait pas vraiment d'autres mots pour décrire ce qui était en développement; dire que FreeBSD exécutait les binaires Linux n'était pas vrai si vous n'aviez pas compilé le code ou chargé un module, aussi un terme était nécessaire pour qualifier ce qui était chargé — donc l'“émulateur Linux”.
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